Pas de partenariat avec l’Afrique centré sur les populations sans les collectivités territoriales
Les dirigeants locaux et régionaux africains et européens ont discuté, mardi (15 février), de l’avenir de leurs continents lors d’un forum consacré aux villes et régions, dans le cadre de la Semaine Afrique-Europe. Ils ont clairement indiqué que le nouveau partenariat UA-UE ne fonctionnera que si les collectivités territoriales sont activement impliquées, car elles constituent le niveau de gouvernance le plus proche des citoyens.
Après une journée entière de débats entre les dirigeants locaux et régionaux africains et européens, les cinq réseaux coorganisateurs du forum ont adopté une déclaration commune, remise à la commissaire chargée des partenariats internationaux, Jutta Urpilainen. Dans son discours d’ouverture, Mme Urpilainen a déclaré que l’heure était aux discussions pour définir des recommandations qu’elle pourrait transmettre directement aux dirigeants, promettant de faire passer le message lors du 6e sommet Union européenne – Union africaine (17-18 février).
Ce forum a été organisé conjointement par la Commission européenne, PLATFORMA, l’Association internationale des maires francophones (AIMF), le Commonwealth Local Governments Forum (CLGF), Cités et Gouvernements Locaux Unis (CGLU) et Cités et Gouvernements Locaux Unis Afrique (CGLU-A).
La commissaire a souligné l’ambition commune d’un partenariat égalitaire et axé sur les populations et individus : les deux continents ont besoin l’un de l’autre pour évoluer et faire face aux défis actuels et futurs. Le maire de Valongo (Portugal), José Manuel Ribeiro, a mis en lumière cette interdépendance en déclarant qu’ils forment presque un seul continent, dépendants l’un de l’autre. Il a également conseillé aux dirigeants d’« imaginer l’Afrique et l’Europe comme deux arbres gigantesques. Les pouvoirs locaux et régionaux comme les puissantes racines qui garantissent que nous pouvons construire un partenariat pour l’avenir. »
Les collectivités locales et régionales font partie de la solution, avec les citoyens.
Maintenant que les plans financiers ont été approuvés, la commissaire Urpilainen a déclaré que les autorités locales et la société civile doivent être consultées pour définir des projets concrets. En effet, les collectivités territoriales sont nécessaires pour s’assurer que ces grands investissements soient aussi efficaces que possible, et atteignent réellement les populations, a rappelé Ronan Dantec, sénateur de Loire-Atlantique (France), porte-parole du CCRE et de l’AFCCRE sur le climat.
La maire de Sala (Suède), Carola Gunnarsson, a rappelé que « 65 % des cibles des 17 objectifs de l’Agenda 2030 ne peuvent être atteintes que si elles sont réalisées au niveau local ». C’est le niveau le plus proche des citoyens et donc le plus à même de les impliquer activement dans le processus de prise de décision.
« Les problèmes sont mondiaux mais les solutions sont locales » a ensuite déclaré la cheffe d’unité de la DG pour les partenariats internationaux, Chiara Adamo. Ces propos ont été repris par le maire de Valongo qui a appelé à la participation des citoyens. Il a déclaré que sans investir dans la participation civique, il n’y a aucune chance de changer le comportement humain, et donc de lutter efficacement contre le changement climatique : « Les citoyens sont les meilleurs alliés des différents niveaux de gouvernement », a-t-il déclaré.
Déjà en première ligne de la coopération au développement
« Nous sommes tous les maillons d’une même chaîne », a déclaré Annie Chrystelle Limburg, maire adjointe de Libreville (Gabon). Elle a présenté l’importance des actions de la ville dans la vie quotidienne de ses citoyens dans tous les domaines : la santé, l’éducation ou la lutte contre l’insalubrité. Elle a également expliqué que ce n’est que par un partenariat mettant en avant les autorités locales et s’appuyant sur la coopération décentralisée, que « nous pourrons relever ensemble les défis auxquels nous sommes confrontés » et atteindre les objectifs des agendas nationaux et internationaux.
Cécile Gillot, chargée de coopération à Lille (France) a présenté les échanges de longue date entre sa ville et Oujda (Maroc) en termes de coopération décentralisée, ayant commencé par une coopération culturelle et ayant développant les possibilités de formation pour renforcer les connaissances techniques. « Nous n’envoyons pas de personnel ou de matériel à Oujda, nous formons et recrutons sur place ». En 2020, le partenariat a été récompensé par le 3e prix des PLATFORMAwards pour ses composantes sur l’énergie et le changement climatique.
Cette importance des collectivités locales dans la gestion des crises et la recherche de solutions a également été soulignée par Valérie Dumontet, vice-présidente de l’Aude (France) représentant Cités Unies France : « Les collectivités locales sont en première ligne car c’est là que se trouvent les populations et donc que se trouvent les solutions ». En effet, les systèmes doivent être adaptés pour prendre en compte les différences entre les territoires. Elle a demandé aux Etats de renforcer leur soutien à la coopération décentralisée. « La coopération décentralisée pourrait être le pilier d’un partenariat équitable entre l’Afrique et l’UE », a également répété Ronan Dantec.
Un rôle de premier plan pour relever les défis urbains et environnementaux
« Nous sommes à la croisée des chemins : la reprise post-Covid nous a fait prendre conscience de ce qu’était notre rapport à la nature. Nous devons trouver comment aller vers une transition verte, comment recréer nos liens avec la nature », a déclaré le secrétaire général de CGLU Afrique, Jean-Pierre Elong Mbassi. Il a souligné le rôle clé des gouvernements locaux et régionaux dans ces réalisations. Pour créer une planète durable et inclusive, ils doivent être inclus dans l’élaboration des politiques à tous les niveaux.
En effet, les autorités locales sont des acteurs privilégiés comme l’a souligné la présidente de la région de Nouakchott (Mauritanie) Fatimetou Abdel Malick : « Les villes sont des lieux où vivent de nombreuses personnes. C’est là que se joue l’avenir et notamment la transition verte. »
Les collectivités locales et régionales sont déjà engagées dans une transition durable, verte et juste et ont joué un rôle exemplaire dans cet objectif par le biais de la planification et des marchés publics, comme l’a souligné le président du CCRE, Stefano Bonaccini. Cet engagement est également présent chez les organisations nationales et internationales de collectivités territoriales. « Elles coordonnent, sensibilisent, conseillent et font entendre la voix des collectivités locales et régionales », a déclaré le président Bonaccini.
Par conséquent, ce rôle de premier plan des collectivités locales doit être reconnu, comme l’a souligné Vaida Aleknaviciene, représentante du CdR et porte-parole de PLATFORMA : « Lors de la COP 27, nous devons viser à promouvoir la coopération et le dialogue entre les collectivités locales de l’UE et du monde entier, dans le but ultime d’obtenir une reconnaissance mondiale des villes et des régions ». Valérie Dumontet a insisté sur le même point, demandant que les gouvernements locaux soient autorisés à assumer leur rôle d’acteurs actifs dans la lutte contre le changement climatique. En effet, les actions climatiques locales peuvent être extrêmement efficaces, mais seulement si elles sont reconnues et encouragées.
En savoir plus :
- Lire la déclaration du Forum Afrique-Europe des gouvernements locaux et régionaux
- Accéder à la couverture en direct sur Twitter :
- 15/02 Matin & après-midi
- 16/02 « Rencontrez les dirigeants«
- 17/02 Jeunesse et villes contre le Changement climatique