Interview | Les communes d’Anderlecht et Marsassoum primées aux PLATFORMAwards

3 mars 2023

Cette interview a été initialement publiée par Brulocalis en français et nééerlandais dans le numéro 132 de janvier-février 2023 du magazine Trait d’Union (pages 44 & 45).

Par Quentin Vanhay, chargé de la communication externe chez Brulocalis

Le partenariat entre les communes d’Anderlecht et de Marsassoum, représenté par M. Julien Milquet  Echevin des Sports, de la Cohésion sociale, des Cultes et de la Solidarité internationale à la commune  d’Anderlecht) et Sény Mandiang (maire de Marsassoum) a reçu le 6 décembre 2022 le premier prix des PLATFORMAwards 2022 des mains de l’eurodéputée allemande Mme Pierrette Herzberger-Fofana, à Grenoble (France). Le Programme biennal, co-financé par l’Union européenne, récompense les projets qui visent à développer les pratiques de coopération au développement entre villes et régions. À cette occasion, nous avons posé quelques questions à M. Milquet – en compagnie de Mme Anaïs Marie, Chargée de projet : relations internationales et des partenariats pour la commune d’Anderlecht – sur  les implications d’un tel prix pour sa commune.

Félicitations pour ce prix ! Quelle va-t-être l’implication de celui-ci pour votre commune ?

Julien Milquet : Il y a d’abord la reconnaissance du travail qui a été accompli dans le cadre du Programme. Nous allons ensuite recevoir une aide de l’Union européenne de 20 000 € pour la communication et la valorisation du partenariat. Cela veut dire que des équipes nous accompagneront à Marsassoum dans le cadre d’une future mission et feront des prises de vue, des interviews des habitants des communautés locales, ainsi que des vidéos. Enfin, Anderlecht obtiendra sans doute un rôle de « municipalité conseil » pour, par exemple, aider des communes ou des municipalités un peu partout en Europe qui se poseraient la question de comment créer un partenariat et sur quelles bases, avec quelle philosophie, ou comment le « doper » et l’améliorer…

Était-ce enrichissant de pouvoir participer à ce concours ?

Anaïs Marie : Oui ! Cela nous a offert un souvenir très positif. Outre la possibilité de réseauter, nous avions aussi la chance que d’autres activités se déroulent au même moment dans la ville de Grenoble comme les 48 heures de la transition inclusive ou la Conférence de l’Observatoire International de la Démocratie Participative (OIDP), ce qui m’a personnellement permis de partager et de créer des contacts avec pas mal d’acteurs européens, sénégalais et d’ailleurs.

Le projet anderlechtois a été qualifié comme étant « le plus exemplaire de tous ». Quels aspects se sont  démarqués auprès du jury, d’après vous ?

J.M. : Notre projet comportait des aspects singuliers tels que le volet inclusion, notamment pour les femmes, pour les personnes porteuses d’un handicap, et pour différentes catégories socio-économiques un peu plus précarisées.

A.M. : Nous avons également la chance d’avoir un partenariat qui développe des projets qui sont  holistiques et qui donc répond de près ou de loin à tous les ODD (Objectifs de développement durable, NDLR) des Nations-Unies, mais qui aborde aussi des thématiques plus particulières telles que la gouvernance, puisque nous travaillons à l’équilibre des finances de la commune de Marsassoum.

Qu’est-ce que cela implique pour votre commune ? Comment cette mission est-elle organisée d’un point de vue pratique ?

J.M. : Nous avons envie de travailler et donc d’avoir des résultats, c’est pourquoi nous mobilisons différentes ressources en interne. Il s’agit d’un projet collectif et le but n’est donc pas de laisser les collaborateurs de leur côté mais bien de les impliquer. Un Programme de coopération et de solidarité internationale comme celui-ci, ça se travaille. Il faut des moyens de la part de la commune mais ça nécessite aussi d’aller trouver d’autres ressources. C’est ce que nous avons fait par exemple avec l’obtention de ce prix qui nous apporte une aide supplémentaire de 20 000 €. Nous comptons bien évidemment également sur le soutien financier du Fédéral dans le cadre du Programme de Coopération Internationale Communal délégué pour les communes bruxelloises, à Brulocalis.

Cette récompense pourrait-elle servir d’impulsion pour lancer d’autres projets de ce type au sein de la commune ?

J.M. : Nous travaillons sur un projet de Maison de la Culture et de la Cohésion sociale dans un village palestinien près de Naplouse. Nous voudrions également ouvrir un second partenariat au sud qui sera plutôt axé social et santé avec la province de Zagora au Maroc. Cela les intéresse de venir voir comment nous travaillons sur certaines matières relatives aux seniors et aux personnes handicapées. Enfin, nous souhaiterions relancer certains jumelages historiques avec d’autres banlieues ouvrières de grandes villes européennes comme Hammersmith & Fulham (Londres, NDLR) avec un Programme plutôt axé sur la culture.

Quels sont les expériences et apprentissages à tirer d’un tel partenariat ?

J.M. : Certains domaines peuvent clairement donner matière à s’inspirer et à réfléchir, tels que la question des budgets participatifs ou encore de la cohésion sociale…

A.M. : … mais nous ne pensons cependant pas qu’il y ait de réelles possibilités de réplicabilité directe entre les deux Communes, qui restent très différentes… Une autre manière de pouvoir tirer des enseignements, c’est de mutualiser, de pouvoir échanger, entre autres avec d’autres villes belges membres du Programme fédéral, sur nos expériences afin voir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.

Avez-vous été ou êtes-vous confrontés à des difficultés ou des obstacles dans le cadre de cette  coopération ? Quels sont les écueils à éviter ?

A.M. : Ce n’est pas vraiment un projet difficile. Il existe depuis 2018, est très bien encadré et également  très bien soutenu financièrement, donc nous avons pu avoir les moyens de nos ambitions.

J.M. : Après Il y a la question de la distance et donc du suivi qui peut parfois se poser. Mais nous pouvons heureusement compter sur un partenaire (Marsassoum, NDLR) qui est sérieux, qui est efficace et qui est motivé avec une équipe municipale dédiée qui se démène pour ses citoyens. Il y a aussi eu le COVID.

J.M. : Oui, d’ailleurs pour la petite histoire nos partenaires (de Marsassoum, NDLR) étaient chez nous aux premiers jours du confinement en mars 2020 ! Nous y avons été confrontés directement comme partout et il a pu y avoir un ralentissement sur certains projets, mais cela ne changeait finalement pas grand-chose. Nous avons pu garder un contact par mail et par visioconférence.. Notons également que l’impact du COVID a été moins fort pour eux que pour nous, ce qui leur permettait de conduire leurs activités quasiment normalement.

Cette mission a-t-elle permis de créer de nouvelles synergies entre l’administration, le monde politique et la société civile ?

A.M. : Nous travaillons à plusieurs niveaux et de façon transversale, par exemple, avec d’autres personnes  de la commune comme la receveuse communale qui traite toutes les questions de ressources humaines  et de finances. Au niveau de nos projets, que ça soit ici ou à Marsassoum, nous disposons d’agents impliqués qui font partie du comité de pilotage dédié au Programme.

J.M. : En outre, nous collaborons avec la société civile dans nos projets. Une citoyenne, intéressée par les jumelages européens et qui fait partie de notre comité de pilotage pour Marsassoum, nous a aidés à  (re)prendre toute une série de contacts sur place, et ce de manière totalement bénévole.

Sur une touche plus personnelle : souhaiteriez-vous voir davantage de Programmes de coopération  étrangers comme celui-ci ? Qu’avez-vous pu tirer personnellement d’un tel échange avec vos homologues sénégalais ?

A.M. : J’ai en réserve de nombreux projets intercommunaux ou coopératifs – je suis personnellement très axée sur la coopération décentralisée – mais je n’espère pas non plus avoir 250 partenariats car nous ne pourrions malheureusement pas tout faire (rires) !

J.M. : Sur les apports personnels, je dirais une meilleure connaissance de la structure politique (du  sénégal, NDLR), de la manière de fonctionner de la culture locale, politique et administrative du pays.

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